Politique

Procès de l’achat de l’avion présidentiel : Mme Bouaré Fily Sissoko face à la justice

Lors de son interrogatoire dans le cadre du procès relatif à l’achat de l’avion présidentiel, Mme Bouaré Fily Sissoko, ancienne ministre des Finances et de l’Économie, s’est présentée avec assurance devant les juges, affichant une voix dynamique et une bonne santé apparente. Ce procès, qui a suscité un vif intérêt tant au niveau national qu’international, a rassemblé une centaine de personnes dans la salle d’audience, témoins de cette affaire très médiatisée.

Le 25 septembre 2024, alors que Bamako était sous une pluie battante, l’audience a débuté à 9h15 sous la présidence d’un juge qui a posé des questions pertinentes à Mme Bouaré Fily Sissoko, poursuivie pour détournement de fonds et complicité d’atteinte aux biens publics. Malgré la gravité des accusations, elle est apparue sereine, manifestant sa bonne foi pour expliquer sa version des faits.

Mme Bouaré Fily Sissoko a souligné qu’elle avait agi sous les injonctions de sa hiérarchie lors de la signature du décaissement de 18 milliards de FCFA du Trésor public pour l’achat de l’avion présidentiel. Elle a précisé qu’à l’époque, elle ignorait que l’avion n’avait pas été immatriculé au nom du Mali, ni que les documents d’acquisition n’étaient pas identifiés à ce titre. Face aux pièces fournies par le tribunal, elle a affirmé ne pas avoir connaissance de ces faits, tout en reconnaissant et détaillant les dépenses effectuées pour cet achat. Elle a déclaré : « Tout ce que je sais, c’est que l’avion est ici, au Mali, et qu’il continue à servir le pays. »

Le procureur général a toutefois relevé des irrégularités dans la procédure d’achat. Il a notamment souligné que l’avion, au lieu d’être immatriculé au Mali, l’a été à Anguilla, une juridiction étrangère. En outre, il n’appartiendrait pas au Mali. Des écarts notables ont également été observés dans le montant de la transaction, certains évoquant un coût de 7 milliards de FCFA, tandis que Mme Sissoko parle de 18 milliards, le Trésor public de 21 milliards, et l’ancien Premier ministre Moussa Mara de 20 milliards. Mme Sissoko a maintenu que le contrat transmis par le ministère de la Défense s’élevait bien à 18 milliards.

Une question légitime se pose : comment un avion d’une valeur de 7 milliards de FCFA a-t-il fait l’objet d’un contrat de 18 milliards ? Mme Sissoko a déclaré qu’elle n’avait aucune connaissance d’une éventuelle redirection des fonds et qu’elle disposait de preuves que l’argent avait bien été transféré au compte du fournisseur.

Elle a également justifié l’achat de l’avion présidentiel par le fait que le Mali dépensait alors 330 millions de FCFA par mois pour les déplacements présidentiels. Selon elle, l’acquisition d’un avion était une solution pour réduire ces coûts. Cependant, le président de séance a rappelé que, conformément à la loi malienne, toute dépense excédant un milliard de FCFA devait être approuvée en conseil des ministres, ce qui n’a pas été le cas pour cet achat. La question demeure donc : l’achat de cet avion répondait-il réellement à un besoin de sécurité nationale justifiant le non-respect des procédures légales ?

Ce procès soulève de graves questions de gouvernance au Mali. Les cadres de l’État, confrontés aux injonctions de leur hiérarchie, semblent incapables de démissionner ou de s’opposer à des ordres illégaux. Cette affaire n’est que l’une des nombreuses situations où des fonctionnaires se retrouvent devant la justice pour avoir obéi à des directives politisées ou malveillantes. Mme Bouaré Fily Sissoko, ayant déjà passé trois ans en détention provisoire, refuse aujourd’hui de verser une caution pour obtenir une liberté conditionnelle, ce qui laisse supposer qu’elle est déterminée à prouver son innocence.

Dans l’attente du verdict, ce procès offre une leçon sur les failles de la gestion administrative au Mali. L’interrogatoire de Mme Bouaré Fily Sissoko a permis de découvrir des magistrats professionnels, respectueux de la personne poursuivie, tout en exposant les dérives dans l’exécution des missions administratives. Il est crucial de renouer avec la confiance dans notre système judiciaire.

Info360.info

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