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Drone, pétrole et méfiance : Mali-Algérie, le prix d’un malentendu géostratégique

Dans un Sahel où les intérêts sécuritaires, économiques et diplomatiques se croisent et parfois s’entrechoquent, le dernier incident entre le Mali et l’Algérie, autour de l’anéantissement d’un drone malien, résonne comme un signal d’alarme. Deux pays frères, liés par l’histoire, la géographie et le destin, se trouvent à nouveau au bord d’une crise de confiance, alors même que les perspectives de coopération, notamment dans le secteur stratégique des hydrocarbures à Taoudéni, n’ont jamais été aussi prometteuses. À l’heure où la France et l’Algérie renouent leur coopération sécuritaire, quelle place pour le Mali dans ce nouvel échiquier ? Et surtout, quelles solutions éthiques, diplomatiques et pragmatiques pour restaurer la confiance entre Bamako et Alger, dans l’intérêt supérieur des peuples sahéliens, algériens, français et africains ?

L’incident du drone malien abattu par l’armée algérienne, bien que contenu dans les communiqués officiels, a provoqué un malaise profond. Un malaise d’autant plus regrettable qu’il survient après une dynamique bilatérale relancée en 2021, avec la visite de haut niveau d’une délégation malienne en Algérie. Cette mission avait jeté les bases d’une coopération ambitieuse sur le bloc pétrolier 20 du bassin de Taoudéni, promettant enfin une valorisation des ressources du sous-sol malien, avec le soutien de la Sonatrach via sa filiale SIPEX.

Mais aujourd’hui, cette dynamique semble fragilisée, alors que la France, qui a perdu son influence au Mali et dans la zone AES, multiplie les signaux de rapprochement vers Alger. Ce contexte diplomatique mouvant ravive les suspicions et questionne la sincérité des engagements de part et d’autre.

À y regarder de plus près, l’incident du drone n’est que la partie visible d’un iceberg complexe. Il traduit une crise de communication, un déficit de transparence et surtout, une absence de mécanisme clair de coordination sécuritaire entre deux armées pourtant engagées dans la lutte contre le terrorisme sahélien. Dans une région minée par les trafics, les groupes armés et les influences étrangères, toute ambiguïté peut être exploitée par des forces hostiles à la stabilité régionale.

De plus, ce regain de tension sert de terreau à toutes sortes de spéculations : exploitation politique, pressions économiques, repositionnements diplomatiques… Ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement un drone, mais l’avenir énergétique du Mali, la stabilité des zones frontalières, et la capacité des États sahéliens à définir ensemble leur destin, loin des influences exogènes.

Pour sortir de cette impasse et rebâtir une relation de confiance, plusieurs mesures s’imposent , d’abord créer un mécanisme bilatéral de coordination sécuritaire entre les forces armées maliennes et algériennes, pour éviter les malentendus et garantir une coopération efficace sur les zones sensibles comme Taoudéni. Ensuite relancer immédiatement les travaux de recherche pétrolière sur le bloc 20 avec l’implication conjointe de SIPEX, de l’État malien et d’un comité de suivi indépendant. Le développement de cette ressource pourrait transformer la donne économique du nord du Mali et offrir des dividendes partagés. Mettre en place une diplomatie citoyenne et culturelle entre les deux pays, avec l’organisation régulière de forums d’échange entre intellectuels, journalistes, universitaires, jeunes et leaders communautaires des deux côtés de la frontière. Éviter les jeux d’alliances exclusives : Le Mali ne doit pas être un terrain d’affrontement entre la France, l’Algérie, le Maroc, ou d’autres puissances. Il doit redevenir un pont de coopération régionale, fidèle à sa tradition de dialogue. Et en fin impliquer des médiateurs tiers de confiance (Union africaine, pays neutres, experts sahéliens) pour relancer la mise en œuvre sincère de l’Accord d’Alger, car la paix durable passe par l’écoute et le respect mutuels.

Ceux qui parient sur l’oubli des peuples, sur la rupture des liens historiques et sur les querelles diplomatiques éphémères, se trompent lourdement. Le Mali et l’Algérie partagent plus qu’une frontière, ils partagent une responsabilité commune dans la stabilisation du Sahel, dans l’émancipation énergétique de l’Afrique et dans l’affirmation d’une souveraineté continentale.

Comme journaliste en ligne engagé dans une démarche éthique, je reste convaincu que le rôle des médias n’est pas d’attiser les conflits, mais d’éclairer les consciences, de proposer des voies de paix et de rappeler, quand il le faut, que l’intérêt des peuples doit toujours primer sur les calculs des élites. Le bonheur des peuples sahéliens, algériens et même français ne se construira ni sur des débris de drones, ni sur des alliances circonstancielles, mais sur la vérité, la coopération équitable et la vision commune.

Par Mamadou CAMARA
Journaliste – Promoteur du journal en ligne Info360.info, Coordonnateur général benevol de la Radio Couleurs Média 99.3Mhz
Email : layakamadou@yahoo.fr
Cellulaire : +223 76 26 99 97.Pour une presse libre, constructive et au service de la vérité.

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